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Markiel RAPS convoi 4 par sa fille Liliane SOTENBERG

Mon papa, Markiel Raps né le 9 avril 1907 à Varsovie et ma maman, Brucha Elbaum née le 15 avril 1906 à Varsovie, se sont connus à Varsovie avant la guerre de 39-45. Ils étaient très amoureux. Moi je ne me souviens pas du tout de mon papa mais sur les photos et selon ma maman, il est mince, très brun avec de beaux yeux bleus. C’étaient de jeunes intellectuels de gauche, intelligents, compétents, courageux et ambitieux. Malheureusement, la Pologne de l’époque n’offrait pas d’avenir à ce jeune couple juif.

Ayant appris le français, ils décidèrent d’émigrer en France. C’est mon papa qui est parti le premier et dès novembre 1936 il figurait au service du registre des métiers au titre de tricoteur. C’est alors que Maman l’a rejoint et qu’ils se sont mariés le 7 juin 1938.

Ils se sont installés 10 rue du Pont aux Choux à Paris 3ème. Papa y avait son atelier avec ses énormes machines à tricoter et maman travaillait comme couturière à domicile et moi, Liliane, je suis née le 18 janvier 1939. Enfin et après tant de sacrifices, ils se projetaient dans un futur paisible.

Oui mais en mai 1941, mon papa est convoqué au commissariat pour « vérification d’identité » et comme disait ma maman, c’est à partir de ce moment-là qu’elle s’est retrouvée seule avec un enfant de 2 ans et 4 mois, sans relations, sans argent.

C’est à la fin de la guerre et grâce aux recherches de Serge Klarsfeld que nous avons appris que Papa a été déporté à Auschwitz le 25 juin 1942 par le convoi 4 à partir de Pithiviers et que, selon les informations du Musée d’Auschwitz « murdered » le 17 Septembre 1942.

Maman et moi, sommes restées dans l’appartement jusqu’au jour où la police française est arrivée dans la cour de l’immeuble et a demandé à notre concierge, mademoiselle Berthe, à quel étage habitait Madame Raps. Mademoiselle Berthe a dit à voix très haute : « il y a déjà un moment que Madame Raps n’habite plus ici », ce qui nous a permis de l’entendre et nous nous sommes blotties l’une contre l’autre, Maman m’étouffant presque lorsque la police a tambouriné à la porte, afin de m’empêcher de pleurer.

C’est alors que ma maman a décidé de quitter l’appartement et de m’envoyer chez une nourrice à la campagne. Comment a-t-elle connu les Billy qui habitaient Franconville ? Toujours est-il qu’elle s’est rendu compte lors de ses rares visites que j’étais dans un état de malnutrition et de manque d’hygiène. Mais que faire ? Il fallait trouver une autre nourrice. Alors qu’elle se trouvait rue Saint Sabin dans le 11ème, des gens ont crié « il y a une rafle ». Maman est montée en vitesse au 6ème et dernier étage, elle a frappé à une porte, c’est madame Chauvet qui l’a fait entrer chez elle. Là ses nerfs ont craqué. Elle lui a raconté son histoire et celle-ci lui a donné le nom et l’adresse d’une nourrice à Montry en Seine et Marne.

Nous voilà parties toutes les deux et, malheureusement, la nourrice indiquée gardait déjà plusieurs enfants et ne pouvait pas en prendre un autre. Devant notre immense déception, cette dame nous a donné le nom d’un couple dans le village qui n’avait pas l’habitude de veiller sur des enfants, mais qui étaient très gentils et avaient une grande fille de 16-17 ans.

Nous sommes allés frapper chez ceux qui allaient devenir pour moi, « papa Baele » et « maman Baele ». Ils ont été attendris par ma triste apparence et par l’histoire que Maman a racontée. Pour justifier son accent, elle a prétendu venir d’Alsace et pour expliquer mon état qu’à Paris on manquait de tout. Maman a réglé plusieurs mois de pension et c’est ainsi que je suis restée chez papa et maman Baele pendant le restant de la guerre et même quelques années après, le temps que Maman trouve un petit logement et achète une machine à coudre. Encore une fois merci à madame Chauvet qui nous a trouvé une mansarde juste à côté d’elle. Nous n’avons jamais oublié mademoiselle Berthe ni madame Chauvet à qui nous rendions visite très régulièrement et ce jusqu’à leurs morts.

Quant à la famille Baele, elle est devenue ma famille puisque je n’en avais pas d’autre. Papa et Maman Baele sont décédés. Leur fille Yvonne est décédée. Je suis toujours proche des petits-enfants et arrière-petits-enfants de papa et maman Baele.

Pour terminer sur une note optimiste, nous avons commencé avec mon époux à reconstituer une famille avec deux enfants, quatre petits-enfants et nous espérons bien vivre encore assez longtemps pour avoir la joie de connaître nos arrière-petits-enfants.

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