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Les musiciens de Beaune-la Rolande: Léon Kartun source Wikipédia

Né en juin 1895 à Paris, Léon Kartun est entré au Conservatoire de Paris en 1911 dans la classe de Louis Diémer et a obtenu le premier prix de piano en 1912. Dès 1918, il a joué dans les Concerts Colonne, et a donné plus de 25 récitals à Paris et lors fait de nombreuses tournées en France et à l'étranger.

Léon Kartun possédait un large répertoire et il a arrangé plusieurs pièces pour piano. Il a gagné rapidement une réputation de virtuose.

Dans les années 1920-30, il a enregistré des œuvres de François Couperin, J.S. Bach, Domenico Scarlatti, Jean-Philippe Rameau, W.A. Mozart, Carl Maria von Weber, Felix Mendelssohn, Frédéric Chopin, Franz Liszt; Johannes Brahms, Maurice Ravel, Gabriel Faure, Isaac Albéniz, et Manuel De Falla.

En août 1924 il a joué un concerto pour piano de J.S. Bach au "Proms" de Londres sous la direction de Henry J. Wood. En 1928, il a composé "Quinze exercices pour piano" (Éditions Alphonse Leduc). Il s’est produit fréquemment en duo, notamment avec le célèbre violoniste Georges Enesco (1881-1955). Il a dirigé également l’orchestre de jazz « Léon Kartun et son orchestre ». Stéphane Grappelli (1908-1997) et Michel Warlop (1911-1947 sous le pseudonyme de Waclaw Niemczyk) étaient violonistes dans son orchestre. Il a enregistré en 1934 Knick Knack Blues; Heureux, Joyeux, Amoureux; Golden March et Waiting for you. (Sous le pseudonyme de Henry Atkins).

Pendant la guerre, il a été arrêté en juillet 1942 à Hagetmau (Landes), interné au Camp de Beaudésert (Mérignac, Gironde), puis à Drancy à partir du 26 août. Une semaine plus tard, il a été transféré à Pithiviers, puis à Beaune-la-Rolande le 25 septembre 1942. Affaibli, il a été longuement hospitalisé à l'hôpital de Pithiviers, de septembre 1942 à mars 1943.

Marié depuis 1922 à une femme non juive, donc « conjoint d’aryenne », Léon Kartun a été déclaré « provisoirement non déportable ». Transféré de camp en camp, il a échappé régulièrement à la déportation vers l’Est. Il est resté ainsi plusieurs mois au camp de Beaune-la-Rolande.

« Kartun, stoïque et amer, était préposé tous les matins au ramassage des ordures. Je le voyais arriver de loin, avec deux camarades qui tiraient le tombereau. Kartun avait de gros gants fourrés avec lesquels il essayait de protéger ses mains, ses précieuses mains de pianiste qui, jadis, tant de fois dans Paris, nous avaient valu des heures d’enchantement… (…) Kartun, négligemment, de son unique main gantée, ramassait les détritus… « Poum, poum, poum », chantonnait-il distraitement. Et je savais qu’il composait sa symphonie ».

Madeleine Fauconneau du Fresne
De l’enfer des hommes à la cité de Dieu, Éditions SPES, 1947
[Préface de Yvonne Netter]

De retour à Drancy le 12 juillet 1943, Léon Kartun a été transféré à Cherbourg le 16, puis déporté du 12 août 1943 au 2 septembre 1944 sur l’Ile anglo-normande d’Aurigny (Alderney) où l’organisation Todt avait besoin de main-d'œuvre pour la construction du Mur de l’Atlantique. Comme ses camarades, soumis au travail forcé, aux privations, aux humiliations et aux brutalités de ses gardiens, le pianiste portait des sacs de ciment pour la construction de fortifications, 12 à 15 heures par jour, sous la menace des coups, par tous les temps. Il va pourtant jouer un soir.

« Aujourd’hui nous n’avons pas travaillé et ce soir nous avons un concert pour la première fois que nous sommes dans l’île, c’est une grande détente surtout que nous avons parmi nous Léon Kartun, célèbre pianiste de réputation mondiale. Il va jouer ».

Abraham Noz, lettre du 30 janvier 1944, Aurigny.

Évacué sur le continent par les Allemands, en mai 1944, Léon Kartun s’est évadé de Questrecques (Pas-de-Calais) début septembre.

En 1949, il a témoigné lors du procès des deux SS responsables du camp de Nordeney à Aurigny.

« Je dois à la vérité de dire que, personnellement, je n’ai pas eu le crâne défoncé, je n’ai pas été blessé, mais j’ai subi le régime d’abrutissement scientifique de l’Allemagne. Certains de mes camarades ont peut-être été plus malheureux que moi, en ce sens qu’ils ont eu le bras cassé, qu’ils ont été blessés. Moi personnellement, j’ai subi le régime normal, c’est-à-dire le coup de matraque quotidien, 12 à 14h de travail par jour, etc. »

Léon Kartun, témoignage lors du procès Evers-Adler, 1949.

Après la guerre, il a peu enregistré. Le dernier enregistrement connu date de 1957. Il a fait des tournées en France, Suisse et Belgique. Plus de soixante concerts sont donnés au profit de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés Internés, Résistants et Patriotes).

Il a composé des études pour piano, Caprice rythmique pour le piano, sur un motif de Paganini en 1948 (Éditions Salabert) qu'il a joué lors d'un concert à Roubaix en 1949 et enregistré plus tard.

Ce thème fut inspiré de F. Liszt, J. Brahms, Sergei Rachmaninov and W. Lutoslawski (Variations sur un thème de Paganini pour deux pianos). Il a réalisé également des arrangements pour piano d'œuvres de J.S. Bach. Il a écrit "Synthèse de la technique quotidienne du piano". (142 exercices résumant toutes les difficultés) et édité 36 sonates de Domenico Scarlatti.

En octobre 1947, un concert a été organisé dans la Salle Braun de Metz, auquel ont assisté le maire, le directeur de cabinet du Préfet, le représentant du Gouverneur Militaire de la région, ainsi que le Dr. Burger, Président départemental de la FNDIRP. Le critique musical du quotidien Le Lorrain en a fait un compte rendu très élogieux, regrettant seulement que le piano ne soit pas à la hauteur de l'artiste. Kartun est revenu à Metz en octobre 1950 lors du Festival Beethoven, où il a joué 5 des sonates pour piano du compositeur.

Il est décédé en 1982. On ne sait rien de ses 25 dernières années d'existence

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