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Biographie de Madeleine Rolland par Dany Percheron

Biographie de Madeleine Alexandrine Eugénie ROLLAND

(Document rédigé par Dany PERCHERON, native de Pithiviers)

Mademoiselle ROLLAND, ainsi était-elle désignée au regard des très nombreux et importants services qu’elle a rendus tout au long de sa vie, est née à Pithiviers le 1er janvier 1891. Sa famille était honorablement connue dans la ville. Son père, Alfred ROLLAND (1842-1926) était entrepreneur de charpentes, il était aussi capitaine des pompiers à titre bénévole. Sa mère, Clémence LANGUILLE épouse ROLLAND, est née en 1852, elle est décédée en 1919. Madeleine ROLLAND fut la seule fille du couple et la plus jeune de la fratrie. Elle a eu en effet quatre frères. Elle n’a pas connu les deux aînés qui sont morts en bas âge. Quant à son frère Louis, né le 22 décembre 1876, il succéda à son père comme capitaine des pompiers. Son autre frère, André, est né le 26 décembre 1880. La famille ROLLAND habitait au 38 faubourg de Beauce (actuelle rue du Capitaine Giry). Dans son enfance, Madeleine ROLLAND a fréquenté l’école Saint-Grégoire.

Madeleine ROLLAND passa son diplôme d’infirmière de la Croix-Rouge française le 30 juin 1916. L’état de ses services indique qu’en 1914 elle travailla d’abord à l’hôpital-hospice de Pithiviers. Puis durant la Grande Guerre, à partir de 1915, toujours à Pithiviers, elle fut bénévole à l’hôpital complémentaire n°65 qui occupait l’ancienne salle de fêtes de la place des Bornes (actuelle place de Gaulle) Elle y soigna les blessés de guerre amenés par trains sanitaires à la gare de Pithiviers. Pour cela, Madeleine ROLLAND a obtenu la « Médaille de la Reconnaissance française ».

A la Seconde Guerre mondiale, de septembre 1939 à juin 1940, en tant qu’infirmière, elle est affectée à l’hôpital mixte de Romorantin (Loir-et-Cher). Avec la débâcle, cet hôpital se replie à Périgueux (Dordogne) et Madeleine ROLLAND revient alors à Pithiviers. A ce moment le « parc de l’Artillerie » (futur camp d’internement) est occupé par des soldats français retenus prisonniers. Madeleine ROLLAND avec son statut d’infirmière s’occupait du camp et elle favorisa l’évasion de prisonniers. Elle était notamment en contact avec les JALLET, une famille qui habitait la Cité Croix-Saint-Martin dont les logements jouxtaient le camp. Certains jours elle apportait des vêtements de travail que Monsieur JALLET déposait bien en vue sur les fils à linge et le lendemain les vêtements avaient disparu et dans le camp des hommes manquaient à l’appel (ayant été préalablement avertis par Mademoiselle ROLLAND). Après ces évasions, les Allemands venaient fouiller la « Cité » de la cave au grenier, mais sans succès, grâce à la complicité des habitants.

Puis les prisonniers français ont été transférés en Allemagne et plus tard, à la mi-mai 1941, des civils sont arrivés au camp, c’étaient les victimes de la « rafle du billet vert » opérée à Paris contre les hommes juifs. A partir de là, et plus particulièrement après les arrivées de juillet 1941, le nom de Madeleine ROLLAND est surtout associé au camp d’internement des Israélites où elle se rendait à pied chaque jour. Elle allait aussi une fois par semaine au camp d’internement de Beaune-la-Rolande. Ayant accédé au poste d’assistante sociale, elle faisait tout son possible pour soulager la misère des Internés, malgré une certaine hostilité dont faisaient preuve les autorités allemandes à son égard. En dépit des risques encourus, elle continua ses visites au camp. Elle rendait de nombreux services aux Internés, s’employant par exemple à leur faire parvenir du pain azyme (pain sans levain) pour qu’ils puissent respecter les rites de leur religion. Elle servait d’intermédiaire entre les Internés et leurs proches, remettant à ces derniers les objets ou des courriers qui lui étaient confiés dans le camp. Par le biais de la « Croix-Rouge » elle correspondit avec des familles d’Internés, qui la sollicitaient pour avoir des nouvelles de leurs proches. Ainsi ce courrier daté du 30 août 1942, adressé à Monsieur Souweine, habitant en Belgique, dont voici le texte : « Malgré toutes mes recherches, il m’est impossible de savoir vers quelle destination s’est dirigé le convoi du 16 juillet dont votre fils faisait partie. Je note votre adresse et si un jour j’apprends quelque chose sur ces Internés, je vous aviserai aussitôt ».

Avec l’internement massif des familles dans le camp à la suite de la rafle du Vel d’Hiv (qui a eu lieu à Paris les 16 et 17 juillet 1942), les conditions devinrent catastrophes pour ces femmes, enfants et vieillards, en particulier pour ces 2400 personnes entassées dans un grand hangar où la nourriture était trop insuffisante et médiocre et bien sûr les conditions sanitaires absolument déplorables. La tâche était immense et les moyens dont disposait Madeleine ROLLAND étaient dérisoires. Mais elle poursuivit sa tâche avec abnégation devant tant de détresse humaine. Elle se dépensa sans compter pour améliorer le sort des internés, étant particulièrement sensible à la misère des enfants. D’ailleurs après-guerre, les familles israélites ne manqueront pas de lui témoigner leur reconnaissance. De même après son décès lors de leur pèlerinage annuel du 14 mai (en souvenir de la « rafle du billet vert » survenue  en 1941) elles déposeront une gerbe sur sa tombe.

Après la fermeture du camp, en septembre 1942, Madeleine ROLLAND poursuivit sa tâche en aidant notamment les familles pithivériennes modestes, étant très sensible à la condition des mères et de leurs jeunes enfants. Madeleine ROLLAND était également une personne pieuse qui prenait aussi le temps d’enseigner le catéchisme, elle s’occupait du patronage. Elle confectionnait également  des tricots pour les gens  dans le besoin. Bien des familles lui furent reconnaissantes, comme cette famille d’Ascoux dont le père était rentré très malade de Déportation. Avec l’aide de Mademoiselle ROLLAND, Monsieur Marceau ALLUARD a pu bénéficier de plusieurs mois de soins au dispensaire de Pithiviers, avant d’être ensuite admis au sanatorium des « Sablons » à Chécy (Loiret). Face à des familles pithivériennes logées dans des appartements insalubres, Madeleine ROLLAND s’employait aussitôt à leur trouver un logement décent. Il y avait d’autant plus urgence qu’il s’agissait de préserver la santé de nourrissons. Elle rendait d’ailleurs visite aux mamans qui venaient de mettre au monde un enfant, leur prodiguait des conseils et les aidait à obtenir des allocations et diverses aides. Elle agissait toujours avec discrétion et efficacité. Ainsi sillonnait-elle sans cesse la ville à pied, sa silhouette était bien connue dans Pithiviers.  

Madeleine ROLLAND s’est aussi investie au sein de la municipalité. Elle a été élue conseillère municipale à partir de 1947 et sans cesse réélue avec une large majorité. Elle assistait régulièrement aux séances et aux commissions. Elle tenait aussi une permanence municipale deux jours par semaine, les jeudis et samedis, deux heures le matin et trois l’après-midi. Elle faisait également partie des conseils d’administration de l’hôpital-hospice, de l’orphelinat Gabriel Lelong et du bureau d’aide sociale.

Toujours en déplacement et par tous les temps, au début de l’année 1964, Madeleine ROLLAND fut atteinte d’une congestion. Mais malgré les conseils de son médecin, elle reprit ses activités vers la fin de mars et le 27 juin elle dut s’interrompre pour s’aliter. Le 1er juillet 1964 elle fut hospitalisée et elle décéda à l’hôpital de Pithiviers le dimanche 3 juillet 1964. Elle avait 73 ans

De nombreuses personnalités vont assister à ses obsèques, car son œuvre rayonnait bien au-delà de la ville de Pithiviers. Elle est inhumée dans la tombe familiale dans le cimetière de Pithiviers. Elle était titulaire de la Croix de Chevalier du Mérite Social et de la Médaille d’Honneur de la Santé Publique.

En octobre de cette même année 1964, le conseil municipal décida de donner le nom de Madeleine ROLLAND à une rue de Pithiviers, puis au centre social qui y fut construit l’année suivante. Une plaque en sa mémoire est apposée sur le bâtiment. Elle est ainsi libellée :

« Par la présence et l’action humanitaire qu’elle a exercées auprès des enfants juifs internés au camp de Pithiviers en 1942

Par les efforts et le dévouement qu’elle a déployés pour développer la protection maternelle infantile

Elle fut un précurseur de la mise en œuvre des Droits de l’Enfant »

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N.B. : il est regrettable que les archives de Madeleine ROLLAND n’aient pas été préservées. En effet au regard de tout le dévouement dont elle a fait preuve auprès des Israélites du camp d’internement, durant cette dramatique période de mai 1941 à septembre 1942, cette grande figure pithivérienne méritait d’obtenir la Médaille des « Justes parmi les Nations », suprême récompensée accordée par l’Etat d’Israël à ceux qui ont contribué à sauver la vie de personnes juives (cela de manière désintéressée et le plus souvent au péril de leur propre vie)

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